1 Septembre 1996

-Home Sweet Home ! Déclara Rigel.

Elle venait de rentrer dans son dortoir dans la tour de Serdaigle et éprouvait un vif soulagement. Étrangement, elle avait dit la même chose quelques mois avant en arrivant chez elle pour l'été. Elle avait bien vite déchanté. Comment se sentir a l'aise chez soit quand un serpent humain squatte de temps a autre les lieux ? Elle avait rarement eu une telle nostalgie de sa chambre avec vue sur le château. Elle vérifia que sa valise était arrivée a bon port et se jeta sur son lit aux draps bleus et bronze. 

-Enfin ! Ronronna elle en étreignant son oreiller. 

Ça paraissait d'une niaiserie extrême mais il fallait dire que la journée avait été assez intense. Réveillée tôt pour parcourir la moitié du pays pour arriver à Londres, parcourir à nouveau tout le pays dans le Poudlard Express en compagnie d’élèves assez agités, le banquet de début d'année et enfin aller discuter avec Albus Dumbledore de l'avenir du monde sorcier, ça faisait un peu beaucoup pour la jeune sorcière. Elle rouvrit les yeux et adressa un signe a celle qui partageait sa chambre, se rappelant qu'elle n'était pas vraiment seule. 

-Salut Luna ! 

Elle se redressa et s'assit en tailleur sur son lit. Elles partageaient la même chambre depuis la première année, ça tissait pas mal de liens. Luna Lodwick était une fille très agréable que Rigel avait eu largement le temps d'adopter comme amie. Elle s'étaient vues dans le train cependant, vu l'ambiance, la situation s'était mal prêté pour bavarder. Surtout de choses peut être plus privées.

-Tes vacances se sont bien passées ?

Il est vrai que sa posture actuelle n'était pas vraiment en accord avec son rang. En principe, une Black-Alyse ne se vautre pas joyeusement a plat ventre sur son lit. Rigel avait tout de même tendance à se lâcher plus que de raison a Poudlard. Aussi, se reprenant et se rappelant qu'elle n'était pas seule, elle ne mit que quelques instants avant de se reprendre et s’asseoir plus convenablement. Assise en tailleurs sur son lit, c'était tout de même plus digne que allongée en mode larve sur son lit. Luna venait de la saluer a son tour, raison de plus pour bien s’installer. Cette posture pour le moins larvaire n'était pas la plus appropriée pour une discussion civilisée.

Rigel détailla un bref instant son amie tandis qu'elle discutait. Ça l'amusait toujours de relever leurs similitudes. Ne disait-on pas que qui se ressemble s'assemble ? De la part de deux brunes a la peau pâle, ça se vérifiait d'autant plus. La jeune fille trouvait que Luna était particulièrement jolie et se prenait souvent à penser que si elle avait été un garçon, elle aurait été volontiers un de ses prétendant. C'était même étonnant que rien de sérieux ne se profilait autour de Luna d'ailleurs. C'était une jolie fille, oui, mais surtout quelqu'un de très doux, qu'on aime à connaître. Une des rares personne qui avait su apprivoiser la froide Rigel Andromeda Black.

Il était question d'un problème avec un Serpentard et de... l'anniversaire de la mort de son oncle ? Rigel devait avouer qu'elle ignorait même que Luna avait eu un oncle qu'elle avait perdu. Le sujet n'était jamais venu sur le tapis. Pourtant, niveau oncle, elle-même aurait eut des choses a dire.

-Je suis désolée pour ton oncle. Ça fait combien de temps ? Dit elle d'un ton doux.

Elle n'était pas la plus forte dans les phrases de consolation, il fallait bien l'avouer. Mais le cœur y était et elle aurait sincèrement voulu savoir exprimer plus de sentiments au travers des mots. C'était l'un des contrepoids de son éducation. À force de ne jamais rien montrer de ses sentiments, on apprend jamais comment les exprimer en cas de besoin. Elle en faisait régulièrement l’expérience quand, comme ce jour, elle aurait voulu montrer plus de chaleur envers une de ses rares amies.

-Mais, dis moi, ce Serpentard ce n'est pas Drago quand même ?

Elle avait bien vu une certaine tension entre Luna et son cousin. Entre la famille et l'amitié, sa loyauté était toujours légèrement partagée. Cependant dans le cas présent, inutile de dire que Drago aurait quelques ennuis s'il s'était pris gratuitement a la Serdaigle. Elle voulait bien défendre les intérêts familiaux et caser de temps a autre une petite phrase sur la pureté du sang, mais il y avait des limites.

-Mes vacances ? Moyen, je suis finalement pas mal sortie de chez moi. L'ambiance à la maison avec le retour de Voldemort, très peu pour moi.

Son ton était parfaitement détaché, peut être trop pour quelqu'un qui a passé ses vacances dans un manoir infesté de mangemorts, dont elle ferait un jour partit et avec une mère folle de joie de voir son maître de retour.

Un miaulement interrompit ses pensées et elle se leva pour aller sortir Samy du panier ou il avait dû voyager. Le félin bondit sur le sol, piétina le tapis du bout des pattes, s'étira et alla s’installer d'un bond sur le lit. Rigel vins le rejoindre mais n'eut guère plus qu'un furtif câlin, façon « je me frotte contre toi pour te rappeler que tu m'appartiens ». Son devoir de félin de compagnie accomplis, Samy retourna au sol pour aller pousser Birdy du bout du nez. Le chat noir avait manifestement envie de chahuter. Rigel se cala contre son oreiller, ses doigts jouant par automatisme avec son pendentif.

L'été avait été encore plus mauvais qu'elle ne l'avait pensé. Son amie avait perdu sa grand-mère. Rigel ne connaissait pas tous les détails de la vie de son amie, mais elle savait une chose : elle aimait beaucoup sa grand-mère. La jeune fille mordilla nerveusement une mèche de cheveux, ne sachant pas bien quoi dire. « Toutes mes condoléances », c'était bien trop cliché et pompeux à dire à une amie.

-Bon sang... L'été a vraiment été nul... Luna, si je peux faire quoi que ce soir pour t'aider, te remonter le moral ou que sais-je, surtout, demandes le moi ! N'hésite pas.

Et cet incident avec le Serpentard n'était sans doute pas la meilleure chose qui pouvait aider Luna. Au moins, ce n'était pas Drago. D'une certaine façon, heureusement pour lui sinon Rigel n'aurait pas hésiter à aller lui botter les fesses au cousin. Ce ne serait pas la première fois ni la dernière, après tout, ils se connaissaient depuis un moment et quand ils étaient gamins, la petite Rigel n'était que peu impressionnée par le petit blondinet. Désormais grands, ça n'avait pas beaucoup changer, le petit prince de Serpentard n'était pas vraiment du genre à intimider Rigel. Il se montrait arrogant ? Et alors, elle était issue du même arbre.

-Owen... Oui ça me dit quelque chose. Je ne connais pas beaucoup de Serpentards en dehors de ceux qui traînent avec Drago. Enfin, tu l'as dit toi-même, c'est un abrutit. Et un abrutit ne mérite pas ton attention.

Pour ce qui était se ses vacances à elle, Rigel esquiva dans un premier temps la question par une réponse assez vague. Le fait qu'elle évite de répondre du éveiller la curiosité de Luna qui la questionna encore en retour. Avec un haussement d'épaule un peu fataliste, Rigel se dit que de toute façon, avec un nom comme le siens, il n'était pas trop dur de savoir de quel genre était sa famille. Mine de rien, le nom des Blacks était très connoté « sang pur » et « allons martyriser quelques moldus pour le dessert ».

-Et bien... Tu vois le genre de ma famille ? Disons que le retour du Seigneur des Ténèbres était chose plutôt attendue.

Après tout, elle ne prenait pas beaucoup de risques, sa mère, comme Lucius ou d'autres, avait échappé à Azkaban bien que tout le monde savait qu'elle avait été mangemort. À grande aide de « j'ai été manipuler » mais aussi de « j'ai une enfant orpheline de père à m'occuper » et de jeux de relations, elle s'en était sorti. Mais toutes études sur Éveline Alyse dévoilait le fait qu'elle avait été fichée comme anciennement mangemort. Cependant, entre ne pas le cacher et révéler directement que sa mère avait repri du service, il y avait une grande marge. Et Rigel n'était pas spécialement emballée à l'idée que Luna découvre trop tôt le motif sombre qui ornait désormais son bras.

-Mais ça n'a pas bien d'importance ! Oh, tu sais quoi ? J'ai acheté un griffoir pour chats, ils vont arrêter de se faire les griffes sur nos pieds de lit !

Joignant les gestes à la parole, Rigel sortir un petit griffoir de sa valise et l’installa dans un coin de pièce. Il n'était pas du tout flagrant qu'elle voulait changer de sujet.

Une sorte de malaise s'était installé, il n'était pas très dur d'en connaître la cause. Pour Rigel, c'était tout à fait naturel de parler ainsi de sa famille, le nom des Blacks avait toujours été associé à la magie noire et à tout ce qui pouvait être anti-moldu, au même titre que les Malefoys. Rien qu'a voir la famille la plus directe, ses grands-parents qui, sans être mangemorts, avaient clairement soutenu Voldemort. Puis Regulus Black, le père de Rigel, qui lui avait été un mangemort déclaré, qui était mort en voulant déserter. Et enfin Sirius Black qui était connu pour avoir massacré une dizaine de moldu et un sorcier en pleine rue.

#L'anecdote la plus dramatique et pourtant la moins vraie# Songea-elle.

Cet été, après avoir croisé Pettigrow dans sa propre maison, elle pouvait difficilement croire encore à la culpabilité de son oncle. Elle n'y croyait déjà pas à 100% à la base mais croiser la prétendue victime d'un meurtre avait achevé de la convaincre. Mais tout ça pour dire que les dernières générations portant le nom de Black s'étaient plutôt illustrée du coté des sang-purs radicaux. Vouloir le nier était la chose la plus stupide à faire.

Mais le sujet semblait mettre Luna mal à l'aise, Rigel aurait voulu la rassurer, lui dire que même si leurs camps étaient manifestement opposés, elle ne s'en prendrait jamais à elle. Elle préféra pourtant seulement changer de sujet en sortant l'arbre à chat acheté pour leurs félins griffus. Le rire de Luna détendit un peu l'atmosphère. Rire que poursuivit Rigel quand Birdy retourna à son griffoir préféré : le pied de lit ! Bien la peine de se donner du mal pour eux tiens.

-Oui, booooooon ! Confirma-elle, amusée.

Samy avait rejoint Birdy et reniflait l'objet avec intérêt, finalement il s’allongea dessus et ferma paresseusement les yeux.

-Espérons qu'ils finiront par comprendre.

Elle se laissa retomber en arrière sur son lit, tête sur l'oreiller, et ramena sa main derrière sa nuque comme elle aimait le faire pour se détendre un peu. Les lits de Poudlard étaient tellement confortable, s'en extraire était toujours une torture. À l'image de son chat, elle ferma légèrement les yeux, appréciant ce moment de calme après la longue journée. Oublié le moment de malaise qui avait eu lieu juste avant, oublié l'été assez étrange qu'elle avait vécu. Un peu trop oublié d'ailleurs, Rigel se gratta sans y penser le creux de son poignet gauche, chatouillé par le coin de son oreiller, relevant très légèrement sa manche, perdue dans ses pensés concernant son emploi du temps du lendemain.

-Tiens je t'ai pas demandé, tu vas poursuivre quoi comme matières pour les ASPICs toi ? Je ne t'ai même pas encore demandé tes résultats des BUSEs !

Parmi les choses qui lui avaient manqué, son lit figurait lui aussi en bonne place. Non pas que son lit chez elle était désagréable, non. Seulement, il n'y avait pas cette atmosphère chaleureuse qui existait dans le dortoir de Serdaigle. Le matelas était moelleux à souhait, les tentures entourant les lits permettaient une isolation parfaite quand le besoin de solitude se faisait sentir ou quand la lune était trop brillante, empêchant le sommeil de par sa lumière. Puis les couleurs, les tissus bleus sombre, ornés par endroit d'étoiles de bronze, les couleurs de Rowena Serdaigle. Chez elle, les couleurs étaient indiscutablement serpentard, même dans sa chambre ou le vert et argent était dominant. Malgré la présence d'un drapeau de Serdaigle, on ne se refait pas.

Puis il y avait aussi ce sentiment d’indépendance. À maintenant 16 ans, vivant à Poudlard depuis ses 11 ans, elle avait appris à ne plus se reposer sur sa mère qui avait du mal à voir sa petite fille grandir. Elle se comportait encore parfois avec Rigel comme si elle était encore la fillette courant partout et chapardant des bouquins en cachette, qu'il fallait faire surveiller la nuit pour ne pas qu'elle aille vagabonder dans les couloirs. La jeune fille n'avait plus vraiment l'habitude d'être couvée, au contraire elle était de plus en plus prise d'un besoin d’indépendance. Cet été avait encore marquer une étape très importante dans la vie de la jeune fille, elle était devenue mangemort. Cette étape arrivait généralement vers l'âge adulte, dans cette guerre, bien des gens étaient amenés à grandir plus vite, elle en faisait partit.

C'est sur cette pensée qu'elle frotta inconsciemment le bras, dévoilant légèrement sa marque. Elle ne s'en rendit pas compte, perdu dans ses pensés, les yeux fixés sur les poutres de bois qui surmontaient son lit, où elle avait accroché de posters des Harpies de Holyhead et des Bizar' Sister
, il y avait aux moins certaines choses pour lui rappeler l'adolescente qu'elle était. C'est seulement en entendant la voix de Luna qu'elle réalisa que son bras avait été visible... Et de l'angoisse que ça suscitait chez son amie.

Elle ne sut quoi répondre, en elle, elle paniquait. Elle n'avait trouvé aucune solution pour cacher durablement sa marque et se doutais bien que tôt ou tard, Luna le découvrirait, elles étaient dans la même chambre après tout. Mais pas aussi vite... Elle avait espéré pouvoir un peu aborder le sujet avant. Bien que tout ça ait sa logique, elle n'avait jamais cacher à son amie de quel coté était sa famille, elle-même savait que tout ça arriverait le jour même ou l'annonce du retour de Voldemort était tombée.

-Et bien... Commença-elle d'une voix peu assurée.

Elle n'alla pas plus loin, Luna venait d'ajouter qu'elle n'était pas obligée de répondre et tenta un changement de sujet.

-J'ai juste louper Astronomie, rien de surprenant. Mais tu sais, pas la peine d'éviter le sujet, j'aurais fini par t'en parler de toute façon... Après tout, ce n'est pas parce que c'est arriver que nous ne sommes plus amies. N'est-ce pas ?

Sa dernière interrogation fut dite sur un ton presque suppliant, bien plus qu'elle ne l'aurait voulu. Elle n'avait pas su contrôler sa voix mais ses sentiments venaient de la trahir. Elle tenait vraiment à son amie, peu importe que cette guerre soit censée les séparés. Elle prit une profonde inspiration et écouta attentivement pour vérifier que personne n'approchait de la chambre. Si Luna avait le droit de tout savoir, elle était bien la seule !

-Alors... Que veux-tu savoir ?

L'angoisse tordait le ventre de la jeune fille, Luna était indiscutablement sa meilleure amie, il n'y avait rien de plus délicat que de révéler à une personne qui nous est chère une chose aussi sombre. Elle allait devoir choisir ses mots, ne pas y aller trop franchement, sa situation était pour le moins ambiguë. Elle ne pouvait même pas dire qu'elle n'était pas fière que ce soit arrivée, qu'elle ne l'avait pas choisit, qu'il l'avait recrutée de force. Ça aurait été des mensonges, Rigel se refusait de mentir à Luna. Que pouvait-elle dire précisément ? C'était tellement délicat, trop lui en révéler les mettrait toute les deux en danger, si elle, elle avait l'habitude de se mettre en danger, la marque sur son bras en témoignait, elle refusait d’entraîner Luna la dedans. Elle se mordilla la lèvre, son amie n'avait pas répondu à sa question implicite, elle ne pouvait pas l'en blâmer, ce devait être déstabilisant.

-C'est vrai, c'est pas vraiment ce qu'il y a de plus habituel. Commença-elle d'un ton qu'elle aurait voulu plus détaché que ça. Je... C'est assez compliqué à expliquer.

Très compliqué quoi. Comment dire à quelqu'un qu'on est devenu mangemort parce que ça fait partit d'un plan plus large qui mènera finalement à la destruction d'une part de Voldemort ? Le tout évidement sans le dire clairement étant donné que Rigel s'était jurée de ne faire intervenir une tierce personne que si elle n'en avait vraiment pas le choix. Nerveusement, ses doigts jouaient avec le bord de ses manches, elle s'avança, assise, sur le bord de son lit pour se rapprocher un peu de Luna. Elle pouvait lui dire des choses qu'elle n'avait encore jamais dit, mais pas la mettre en danger, pas trop en dire.

-Tu connais la réputation de ma famille, n'est-ce-pas ? Mon père était lui-même un mangemort, c'est comme ça qu'il a disparu d'ailleurs. Suivre sa trace était... comment dire... un choix logique pour moi. C'est une chose que je dois faire, une route que je dois suivre, cette route me fait passer par cette étape, ce n'est pas ce qui m'enchante le plus mais c'est ainsi. Je mentirais en disant que je ne l'ai pas choisit, mais ça fait partie de... quelque chose de plus. Ça, désolée, je ne peux en parler plus, je ne veux pas que tu sois impliquée malgré toi la dedans, je ne veux pas te mettre en danger !

Une confidence en entraînant une autre, sans doute aussi spontanée du coté de Luna que pour Rigel quand elle avait fini en en disant plus qu'elle ne le voulait, son amie lui parla de son oncle. Cela fit plus ou moins l'effet d'un coup de poing pour Rigel. Luna lui en avait déjà parler, elle savait qu'elle avait un oncle qui avait disparu.

Mais elle n'avait jamais entendu son nom. Marcus Eden Lodwick.

#Merde...#

Une vague de panique la parcouru, ce nom, elle le connaissait. Elle le connaissait même très bien ! Le problème, c'est que ce n'était pas en tant qu'auror qu'elle le connaissait. Loin de là. Elle ne chercha pas à saisir la suite des paroles de Luna, son esprit était bien trop agité, trop de confusion pour qu'elle parvienne à écouter quoi que ce soit de plus.

Son visage du refléter le choc qu'elle ressentait. Comment diable pouvait-elle annoncer à sa meilleure amie que son oncle était encore bien vivant mais du coté des mangemorts ?

-Luna...

Sa voix était extrêmement sombre, contrastant avec la désinvolture qu'elle avait essayé de se donner auparavant. Entre expliquer un fait qui la concernait, et annoncer ÇA à son amie, la seconde nouvelle était bien plus difficile à aborder.

-Ton oncle. Je... J'en ai déjà entendu parler.

Elle se mordilla à nouveau les lèvres.

-En fait, je l'ai vu, cet été. Continua-elle dans un souffle, se frottant le bras. Le jour ou je le suis devenue, il était là, parmi les mangemorts.

Un lourd silence tomba sur la pièce.

Rigel se sentait très mal, presque nauséeuse, plus elle y pensait et plus ça lui paraissait évident. La seule chose qui l'avait empêché de faire le lien était le fait qu'elle n'avait jamais entendu le nom complet de cet homme, ni en tant qu'oncle de Luna, ni en tant qu'ami de sa mère. En réalité, elle avait toujours entendu sa mère ou les autres en l’appelant seulement par son prénom, ou parfois par « Marcus Eden ». Elle avait toujours cru que c'était son nom et prénom, pas deux prénoms.

Elle l'avait croisé cet été, à présent, elle ne pouvait ignorer les images accolées des visages de Markus et de Luna, il lui avait semblé familier sur le coup, elle comprenait pourquoi désormais. Il y avait réellement un air de famille, tant par la forme du visage, la couleur de cheveux ou tout simplement les yeux, le regard. Rigel ne pu soutenir plus longtemps le regard de son amie qui tentait de nier la nouvelle, elle se détestait de lui annoncer ça.

Pourtant il fallait bien que vérité se sache ! À présent que c'était dit, il fallait que ce soit accepté, compris. Elles étaient des Serdaigles, des érudites en quette de vérité, c'était le moment de faire honneur à leur maison et se montrer digne de la réputation, affronter la vérité, refuser de se réfugier dans un mensonge rassurant et confortable mais pas moins faux. Elle aurait pu lui dire « oui sans doute, ça ne doit pas être lui », mais au fond d'elle, elle savait que c'était la vérité, Marcus Eden, le mangemort, et Markus Eden Lodwick, l'oncle de Luna, n'étaient qu'une seule et même personne.

Ce qui concordait d'ailleurs, l'oncle de Luna avait disparu et même chez les mangemorts, ils avaient été surpris de le voir réapparaître. L'age probable, le physique et l'alibi correspondait. Intérieurement, la jeune fille se sentit bouillonner. Se faire passer pour mort pour cacher ses vrai activités, quelle lâcheté ! Ceci dit, si elle apprenait que son père était en réalité encore vivant mais se cachait, travaillant pour les « ennemis », elle serait juste folle de joie de le voir enfin, peu importe le camp. Nerveusement, elle joua d'ailleurs avec le pendentif qu'il lui avait offert, ça la réconfortait en général, elle avait l'impression de sentir sa présence, ce qu'elle cherchait désespérément dans la nécromancie.

-Je suis vraiment désolée Luna... Il n'y a pas vraiment de place au doute. Il y a un Markus Eden chez les mangemorts, je n'avais jamais entendu son nom de famille... Mais par Merlin, il te ressemble ! Quand je l'ai vu il me rappelait quelqu'un, j'arrivais pas à retrouver, c'était subtil, infime, mais bien présent. Ça ne peut pas être un hasard tout ça... Par ailleurs, même chez les mangemorts ils le croyaient disparu !

Luna était à côté d'elle, Rigel ne résista pas plus longtemps pour l'attirer contre elle. Son amie ne devait pas être seule devant cette nouvelle, c'était elle qui l'avait annoncé, c'était à elle de l'aider à l'accepter.

-Mais... le bon coté des choses... c'est qu'il est vivant non ? Compléta-elle, consciente que positiver devait bien être bien difficile pour son amie.

Elle s'y était attendu mais ce qui se passa la déstabilisa malgré tout. Rigel avait pris Luna contre elle tout en essayant vainement de l’apaiser quand soudain, celle ci avait commencé à pleurer pour de bon. C'était bien la première fois où elle se trouvait dans pareille situation, Luna était sa plus proche amie, si ce n'est la seule. Rigel n'avait jamais eu à réconforter pour une histoire aussi grave. Réconforter sur les examens, sur quelques moments un peu plus dur, oui, mais jamais personne n'avait pleuré dans ses bras.

Quoi que, peut être que si en fait.

C'était chaque année vers la même période, fin de l'hiver, avant que le printemps ne revienne. Rigel était alors toute petite quand ça arrivait. La nuit, alors qu'elle attendait que sa mère vienne lui dire bonne nuit, elle ne l'entendait plus arriver. La petite descendant alors et trouvait sa mère, seule dans le salon vide, contemplant les flammes de la cheminée, les joues brillantes de larmes. L'enfant s'approchait alors d'elle et grimpait à ses cotés, l'entourant de ses petits bras et murmurant « faut pas pleurer maman, je suis sûre que papa il veut pas que tu pleures ». Car la raison, elle la connaissait, c'était la période ou son père avait disparu. Alors Evelyne se calmait peu à peu, regardais sa fille, lui souriait et la prenait contre elle, lui disant qu'elle avait raison.

Inconsciemment, à ce souvenir, Rigel porta sa main libre à son pendentif. Les années étaient passées, Evelyne s'était habituée à l'absence de Regulus, Rigel faisait du mieux pour lui faire oublier ses peines. Ça ne l’empêchait pas de ressentir parfois ce manque elle aussi, comme si elle sentait qu'il était là, pas loin, qu'il aurait suffi de tendre la main pour le rejoindre. Quelque chose dans sa gorge se noua et elle ferma les yeux, serrant un peu plus Luna contre elle. Au fond, elle l’enviait presque, elle, son oncle, il était vivant, accessible. Fort heureusement, son amie brisa le silence juste avant que Rigel ne sombre pour de bon dans la mélancolie.

-Je... oui. Oui, surtout les yeux en fait. Le sourire aussi, il y a vraiment quelque chose.

Bon, là pour le sourire, c'était difficile d'en juger, le moral n'était pas vraiment au rendes vous. Rigel observa attentivement son amie et essaya d'y superposer le souvenir de Marcus Lodwick.

-Physiquement il y a vraiment quelque chose. Pour ce qui est du caractère, je dois avouer mon ignorance, je ne l'ai croisé que furtivement.

Elle s'était redressée, son regard avait repris cette petite lueur de détermination et de vie si importante, Luna avait repris le dessus, Rigel se sentit rassurée et anticipa Déjà sa demande. Elle voulait le rencontrer, quoi de plus naturel ? Après tout, elle était bien la preuve vivante qu'on pouvait être mangemort sans pour autant être un pourrit absolu.

-Je te comprend parfaitement ! Si seulement je pouvais rencontrer mon père... Enfin bon, je pourrais demander à Maman de t'arranger ça, elle doit être en contact avec lui.

Mais où ? Près au Lard était bien trop risqué. D'ailleurs, où logeait-il le tonton ? La solution la plus simple aurait été qu'ils se retrouvent chez elle, en terrain mangemort, tout simplement.

-Tu rentre chez toi pour Noël ? Parce que je pourrais t'inviter chez moi quelques jours, il devrait bien y avoir moyen que vous vous y retrouvez, non ?

C'était surprenant à quel point cela semblait avoir apaisé Luna de savoir qu'elle ressemblait à son oncle. Elle était tout de même heureuse de ressembler à un mangemort, venant d'elle c'était un peu étonnant. Autant Rigel était fière de ressembler à son père mais était elle-même désormais mangemort, autant Luna n'avait rien à voir avec tout ça. Sans la calmer tout à fait, avoir un peu parler de son oncle avait au moins eu le mérite de lui faire cesser de pleurer. Ça faisait mal à Rigel de voir son amie dans un tel état. Mais Luna était une fille au moral fort, elle n'allait tout de même pas se laisser démonter, elle en était certaine.

En tout cas, si ça avait été un début, essayer de planifier une rencontre entre eux sembla terminer de la réconforter. Elle semblait avoir clairement reprit le dessus. Par ailleurs, ça serait une très bonne occasion pour que Rigel puisse inviter son amie chez elle. Elle doutait que sa mère fasse des difficultés, elle serait sans doute plutôt heureuse que sa solitaire de fille invite enfin quelqu'un. Tant que ce n'était pas une née-moldue, elle ne ferait pas trop de réflexions. Le problème, c'était les autres mangemort, mais au final un problème relativement réduit vu qu'ils n’accédaient pas à l'ensemble de la maison, seule le salon qui faisait office de salle de réunion et le couloir menant du dit salon à l'entrée leurs étaient autorisés. Peu de risque donc que Luna se retrouve face à un mangemort du type psychopathe sanguinaire.

-On fera comme ça alors ! Demain j'irais écrire à maman pour lui en parler. Elle ne risque pas de protester, c'est limite elle qui se demande si je me déciderai à inviter des amis un jour à la maison. À l'entendre je suis la dernière des associables.

Ce qui n'était pas tout à fait faux mais pas entièrement vrai non plus. Rigel avait un bon contact avec les gens en général, juste que la plupart ne l’intéressaient pas et que les côtoyer la soûlait plus qu'autre chose. Luna était une exception, c'est vrai que la jeune fille avait assez peu d'amis à proprement parlé. Luna bailla et Rigel suivit dans le même mouvement, c'est seulement là qu'elle réalisa qu'elle était également fatiguée. Elle prit également conscience de la douleur à son bras qui était encore loin d'avoir pleinement cicatriser et dont la potion qu'elle prenait pour apaiser la brûlure ne ferait bientôt plus effet.

-Parfaitement d'accord. Il est plus que l'heure. Approuva-elle.

Elle attendit que Luna ait regagné son lit et, comme s'il avait attendu le signal, Samy réapparu pour sauter sur le lit de sa maîtresse. Il patouna la couverture sous laquelle Rigel venait de se blottir et s'allongea en ronronnant quand Rigel posa sa main sur sa fourrure.

-Bonne nuit, j’espère qu'on va savoir se lever demain. Conclut-elle en baillant.

Le sommeil ne tarda pas à l'envelopper, quelques minutes après que le silence et l'obscurité avaient pris possession de la pièce, Rigel sombra dans un sommeil profond mais, comme de plus en plus souvent, plutôt agité.