Une nouvelle semaine commençait à Poudlard et on était tous habitué aux généreux dîners de la Grande Salle. Lundi soir, Olivia s’était donc rendue à la table des Serdaigle en compagnie de Mandy Broklehurst, Luna Lovegood et Michael Corner. Tous les quatre s’étaient mis à conter leur journée fastidieuse et à discuter des cours qu’ils allaient apprendre prochainement. Chacun énonçait des passages prélevés de diverses livres à la bibliothèque puis, lorsque la nourriture apparut sur la table, le quadruple se taisait pour entamer le repas. La brune aux yeux bleus remplit son ventre de légumes et de pintade ainsi qu’une part de tarte à la fraise. Une fois repue, elle prit la sage décision de remonter dans son dortoir pour poursuivre sa lecture passionnante d’un livre expliquant les principes des anciennes civilisations magiques dans tous les pays. Elle avait emprunté ce livre quelques jours auparavant à la bibliothèque afin de prendre une certaine avance sur le programme d’Histoire de la Magie. Même si elle baillait de fatigue, cela ne l’empêcherait pas de travailler un peu. Entreprenant une marche rapide, tête baissée, on entendait seulement le bruit de ses pas et quelques fois, elle jetait de vifs regards autour d’elle comme si elle craignait d’être suivie. Sa nature paranoïaque la rendait ainsi mais c’était souvent fort utile dans certaines situations.

Après s’être engagée dans l’aile Ouest du château, elle retrouva l’heurtoir en forme d’aigle juste en face. Ce dernier lui posa donc une énigme auquel elle répondit après une réflexion plutôt rapide. L’heurtoir la laissa donc entrer dans la salle commune et elle retrouva un petit sourire lorsqu’elle observait l’habituelle salle aux couleurs bleues et bronze. Seules les flammes orangées de la cheminée ressortaient parmi ces couleurs froides et glaciales. Il s’agissait d’un terrible contraste mais qui offrait tout un charme à cette pièce. Le sac en bandoulière sur l’épaule, elle s’empressa de retrouver son lit douillet situé dans le dortoir des filles, qui était heureusement vide. Même si les Serdaigle étaient calmes de nature, il était aisé de travailler seul pour plus d’intimité. Sans un bruit, elle sortit délicatement son livre de son sac et se positionna ventre contre matelas avant de poser le manuel sur son oreiller. La faible lueur de bougie ne suffisait pas à éclairer comme elle le désirait alors, elle se servit de sa baguette pour produire un meilleur éclairage. Ceci fait, elle feuilleta quelques pages avant de se rendre compte que cette position n’était pas la plus confortable. Après avoir mangé, il aurait été mieux de se mettre sur le dos, tête sur l’oreiller. Elle fronça légèrement les sourcils et inversa donc les positions. Toutefois, lorsqu’elle déposa sa tête brune sur l’oreiller douillet, elle entendit un petit froissement… comme un objet situé en dessous de l’objet en plumes et en tissu. Intriguée, elle se releva dans une posture assise et souleva l’oreiller avant de constater avec une certaine anxiété qu’une enveloppe avait été déposée en dessous. C’était forcément une fille qui lui avait déposé cela ici… soit la lettre provenait de la fille en question ou alors un garçon l’avait chargé de le lui faire. En tout cas, le fait que cette enveloppe ait été cachée sous son oreiller était symbolique. En général, une lettre administrative serait déposée sur un bureau ou quelques part dans un cahier. Une lettre à affinité, en revanche, aurait mieux trouvé sa place dans un milieu personnel et intime.

Sa curiosité fut alors à son apogée et elle ne put attendre plus longtemps pour ouvrir la lettre. Toutefois, elle craignait qu’une farce ne se cache à l’ouverture de l’enveloppe ; c’était le risque à prendre. Qui sait s’il y avait des asticots à l’intérieur ? Prudente, elle prit le bout de papier et sortit de son lit, préférant l’ouvrir près d’une corbeille. Fort heureusement, le contenu était tout à fait normal et elle put s’emparer de la lettre sans le moindre anicroche. La demoiselle parcourut en diagonal le contenu de la lettre avant qu’un sentiment de trouble et un mystérieux frisson ne vienne se frotter à elle. Se concentrant d’avantage, elle relut sagement chaque ligne en encaissant le sens de celles-ci. Ce n’était pas possible ; qui aurait bien pu lui envoyer cela ? Depuis sa dernière rupture au milieu de la quatrième année, elle n’avait plus cherché à sortir avec qui que ce soit, préférant se concentrer d’abord sur ses études. Après tout, l’amour à quinze ans n’était peut être qu’un jeu pour ces messieurs ? C’était bien cela qui la faisait douter. Ce type, à travers ses mots, semblait s’être appliqué quant à sa rédaction et il paraissait bien mature. Il y avait donc des probabilités qu’il soit âgé de plus de quinze ans ou bien qu’il soit précoce. Mais la première supposition semblait la mieux. Bouleversée, elle se laissa tombée sur son lit et ferma les yeux tout en y repensant. C’était du bluff ; quelqu’un voulait plaisanter. Toutefois, sa prudence laissa place à de la curiosité et l’envie de connaître son prétendant, si celui-ci était sérieux. Mais telle qu’elle était décrite sur la lettre, le garçon en question devait la connaître ou l’avoir observé plusieurs fois pour en déduire de tels traits de caractère. Ce soir… dans la tour d’Astronomie.

Elle ne pouvait pas y aller simplement en robe de sorcière, ce ne serait pas convenable. Néanmoins, son trouble et son anxiété prenaient assez le dessus dans son esprit alors elle opta pour un ensemble bleu ciel pailleté (veste, chemise et jupe) plutôt qu’une robe de soirée. Après tout, l’amour ne se résume pas à des grandes robes de mariage ou on ne sait quoi. A l’aide d’un sortilège de métamorphose appris en première année, elle boucla les extrémités de ses cheveux et maquilla légèrement son visage. Une petite couche de parfum à la patchouli et c’était bon. Inutile de s’attarder d’avantage l’embellissement. Elle ignorait à quelle heure se rendrait le mystérieux jeune homme du nom de M.O mais bien qu’elle essayait de deviner le nom et prénom de celui-ci à travers ces initiales, elle n’y parvenait pas encore.

Lentement, elle descendit du dortoir avec ses ballerines blanches et sortit de sa salle commune, le cerveau emplis de toute sorte de pensées. Une simple lettre avait eut le don de l’abandonner à son livre et sur la pointe des pieds, comme si elle craignait l’arrivée de Rusard, elle arpenta les longs couloirs qui menaient à l’escalier principal qu’elle emprunta par la suite pour se rendre à la tour d’astronomie. L’endroit était désert et les bruits de ses pas raisonnaient de temps à autres. La main sur la poignée de la porte, elle s’étonna que celle-ci ne soit pas close et elle pénétra dans la pièce sombre. Sa baguette était placée sous sa jupe, sur le côté de la cuisse gauche.

Les quelques bougies allumées lui permirent d’apercevoir une silhouette au loin..

Au fond, Olivia avait plus ou moins la réponse à sa question mais peut être espérait-elle qu’il y ait une autre raison de sa venue ou quelque chose comme cela. Toutefois, les probabilités étaient bien minimes… quand s’ajoute à cela les initiales qui collaient vraiment avec ce garçon et ce timing trop parfait, il serait bête de se dire que cela n’était qu’une coïncidence. En bref, elle lui avait demandé cela dans l’espoir de pouvoir être rassurée mais visiblement, elle devait se confronter à la réalité des choses. Comme pour essayer de penser à autre chose, elle observait autour d’elle mais la noirceur nocturne ne lui permettait pas de voir tout en détail. A travers la fenêtre de la tour d’Astronomie, elle percevait les contours des autres tours, plus petites et les nuances de gris coloraient les toits qui les recouvraient. Elle ne s’en était jamais rendue compte mais la vue d’ici était très belle, menée sur une bonne partie du lac et de ses montagnes. Elle savait que derrière celles-ci se situait Pré-au-Lard. Mais en cours, elle n’avait jamais fait la comparaison entre cette vue et les autres de l’école. Ce n’était que dans un moment aussi étrange que celui-ci qu’elle en fit la déduction.

Alors, elle retourna de nouveau son attention sur le Serpentard quand il répondit. Il venait de faire le point de la situation et il lui en faisait part ; selon lui, elle aurait aussi reçu une lettre signée de ses initiales. Elle n’aimait pas trop l’idée de lui faire des éloges même au fond d’elle mais elle avouait qu’il était plutôt perspicace et réfléchi. Seulement, il venait lui aussi de dire quelque chose qui déclancha en la demoiselle, un gros doute dans son esprit. Il avait bien dit « aussi » ? Un peu troublée, elle arqua un peu un sourcil tout en réfléchissant. Il était bien tordu qu’il ait lui aussi reçu une lettre. Pourquoi ? Et puis, apparemment, elle avait due être signée OT vu ce qu’il venait de dire. Sortant quelque chose de sa poche, la jeune fille dut se pencher discrètement un peu vers la lumière produite par une bougie pour apercevoir un bout de parchemin. Sans doute une lettre. Ressentant un frisson d’effroi, elle n’aimait décidément pas le guêpier dans lequel quelqu’un l’avait fourrée. Oui, la faute revenait forcément à quelqu’un qui avait voulu leur faire une blague.

Techniquement, il n’y avait aucun intérêt à Owen de l’avoir faite lui-même alors qu’il semblait être venu seul et que les expressions qui se dessinaient sur son visage n’avait rien d’une personne entrain de faire un mauvais coup. C’était vraiment gênant de parler de tout cela mais quand Olivia se résolut à lui répondre, il lui coupa la parole en sortant de son calme. Ce fut incroyable de voir comment il était passé d’une attitude posée à quelqu’un qui venait d’avoir une illumination en gueulant sa pensée au monde entier. Bon, là, c’était un peu exagéré mais l’idée était là. Sur le coup, Olivia écarquilla les yeux, se demandant jusqu’où irait cette illumination. Un peu désorienté par la suite, elle répondit à la dépêche tout en marquant une certaine distance :

« - Calmes-toi Owen ! J’ai bien deviné que la lettre ne venait pas de toi. En tout cas, je l’ai retrouvé sous mon oreiller alors que j’étais entrain de lire. »

D’ailleurs, aucun garçon n’aurait pu s’introduire dans le dortoir des filles. Certes, on pouvait accéder à la salle commune juste en répondant à une question mais certains élèves pouvaient se montrer bien talentueux en devinettes, qu’ils soient de Serdaigle ou pas. Cela n’empêche que le coup devait provenir d’au moins une fille. En ce qui concernait Matt, il devait y avoir également un garçon jouant un rôle dans cette farce. Seulement…

« - Tu te serais pas embrouillé avec quelqu’un de ta maison, en ce moment ? Plus exactement, avec une personne suffisamment tordue. Tout ceci aurait constitué une bonne vengeance j’imagine. »

S’il fallait partir d’une piste, il fallait au moins soupçonner les personnes avec qui on avait des relations positives ou négatives. Du côté de Olivia, si ce n’est de la compétition rivale avec des élèves d’autres maisons, elle n’avait pas tellement eut de problèmes. Si, avec Owen et d’autres pimbêches de Serpentard mais… cela ne collait pas avec la situation. Et puis ces pimbêches en question s’embrouillaient avec pas mal de gens donc il serait tordu de s’en prendre uniquement à elle et d’une façon trop réfléchie et risquée. Donc, il y avait un peu plus de chances que le problème ne vienne autour du réseau social de ce jeune homme. Sur le coup, elle lui en voulait un peu mais le mal était fait et le mieux qu’elle pouvait faire était d’élucider le mystère qui rôdait autour d’eux.

Si Matt Owen avançait que tout un tas d’élèves le craignaient et le haïssaient, la liste des suspects s’étendait encore plus et plus cela devenait vaste, moins il serait facile d’en connaître le coupable. Olivia ne lisait pas souvent les romans policiers sorciers mais elle savait au moins que dans ces histoires, le nombre de protagonistes était limité. Comme quoi, la plupart des histoires se montraient bien fictives et parfois peu représentative de la réalité. A part une de ces personnes qui ne devaient pas apprécier le Serpentard, Olivia ne voyait pas qui aurait pu être derrière tout cela. Même si le jeune homme avançait qu’il s’agissait bien plus d’une farce que d’une vengeance, la probabilité que le coupable soit un élève ne changeait pas tellement aux yeux de la demoiselle. On pouvait exclure les élèves qui le redoutaient fortement, certes, mais conserver ceux qui avaient plus ou moins un lien à peu près positif avec lui. Toutefois, la question était de savoir s’il existait des gens avec qui Owen avait de bons rapports. Elle préférait ne pas en juger trop vite la réponse mais elle se doutait bien qu’il y avait des chances que son cercle « d’amis » soit assez restreint. Surtout, en vue de ce caractère de garçon borné et incorrigible. L’adolescente sortit à son tour sa lettre, dans l’intention de la lire et d’y déceler ne serait-ce qu’un petit indice.

Mais lorsqu’elle sortit le bout de papier de sa cachette, Matt ne se gêna pas pour la happer en vitesse. Encore une fois, elle se demandait vraiment comment on pouvait supporter ce genre de comportement, allant vraiment dans l’impolitesse. Si ce mystère l’excitait tant que cela, ce n’était pourtant pas une raison pour manquer au respect. Néanmoins, elle ne dit rien pour l’instant, considérant la recherche de pistes plus importantes que de faire la discipline. Alors elle le regardait de ses yeux bleus, essayant de savoir à quoi il pouvait bien penser, lui qui avait de quoi commencer une enquête en comparant ces lettres. Rapidement, il conclut son analyse en prenant de grands airs de quelqu’un qui savait et qui avait trouvé quelque chose. Maintenant qu’elle s’en souvenait, il était vrai que l’écriture semblait être soigneusement appliquée mais c’était justement parce qu’elle paraissait venir d’une femme que celle-ci avait inévitablement fait son coup avec d’autres personnes. Ensuite, il était quand même bizarre qu’il n’y ait personne aux alentours pour les surveiller… Qu’ils soient cachés ou pas, Olivia ne sentait pas la présence d’intrus et c’était un peu étonnant. S’il s’agissait d’une blague, il aurait été plus drôle d’épier les victimes et de les prendre en flagrant délit avant de se moquer d’eux. Ce fait renforçait donc ce que venait d’avancer Owen…l’hypothèse qu’ils n’étaient pas les seules victimes. Si tel était le cas, la farce n’était pas n’importe quel humour à deux balles visant à ridiculiser seulement deux personnes. Selon la jeune fille, l’objectif était bien plus précis que cela. Tout en se tortillant une mèche de ses cheveux ondulés, elle continuait de l’écouter exposer sa théorie sur la possibilité qu’un prof ou que des elfes soient dans le coup. Sur le moment, cela eut le don de faire rire nerveusement Olivia puisque selon elle, il était bien inconcevable qu’un professeur puisse faire cela. Non, elle ne voulait pas y croire parce qu’aucun professeur n’aurait que ça à faire durant leur quotidien d’enseignants, à corriger les copies ou à structurer leur prochain cours. Cette hypothèse en elle-même l’effrayait et la gênait vraiment. Pourquoi un prof l’aurait choisie elle pour la caser avec Owen ? Pourtant, bien qu’elle aurait aimé ne pas y croire, sa raison n’écartait pas cette éventualité. Mais dans ce cas là, un professeur à lui seul n’aurait pas eu cette idée de piocher des élèves au hasard et de faire la farce juste pour s’amuser. Ce serait puéril. Donc, il avait eut recours à des complices.

« - Je pense comme toi que s’il s’agit d’un fait venant d’un membre du personnel, alors nous ne somme pas les seules victimes. Mais si c’est un prof, je pense qu’on peut aussi compter l’implication des elfes dans cette histoire. Il ne faut pas oublier qu’ils sont capables de plus ou moins transplaner dans tout Poudlard car leur magie est différente de la nôtre. S’ils sont dans le coup, il leur aurait été facile de se déplacer jusqu’à nos chambres pendant le banquet. Si c’est le cas, Dumbledore est également responsable. Quant à l’elfe qui appartenait à Malefoy, j’ai du mal à concevoir le pourquoi il aurait agit de son propre chef pour faire ça. »

A la base, les elfes se fichaient bien des relations que pouvaient avoir des sorciers entre eux. Habituellement, ils se contentaient d’obéir à leurs maîtres mais si l’un d’eux avait été affranchi, Olivia pensait qu’il aurait profité de son indépendance pour vivre sa vie ailleurs qu’à Poudlard ou pour rendre service sans pour autant obéir au doigt et à l’œil du directeur de Poudlard. Et puis, s’il était de nature farceur tel que Peeves, Dumbledore aurait certainement pris des mesures pour ne pas qu’il nuise à l’école. Pourtant, cette farce avait été réussie et la Serdaigle voyait parfaitement le directeur à la tête de ce complot. Après tout, lui et le Choixpeau Magique voulaient que les quatre maisons vivent en paix, sans litiges. Il aurait très bien pu organiser cela pour attirer les opposés et les forcer à s’allier ensemble à travers tout ça. Oui, cela pouvait coller. Relevant la tête brusquement, elle observait Owen de ses yeux bleus :

« - Tu ne penses pas qu’aller identifier les victimes serait le mieux qu’on puisse faire pour commencer ? On pourrait par exemple établir les liens noués entre chaque binôme. J’ai une petite idée sur la nature de ce lien mais je pense qu’il vaut mieux vérifier. Tu es d’accord sur le fait qu’à la base, nous ne sommes pas des amis et que tu n’aurais sûrement pas manqué une occasion de me rabaisser, n’est-ce pas ? Alors si ça se trouve, les binômes en question seraient des personnes qui ne peuvent habituellement pas se blairer, qui sont totalement opposés. Donc, on aurait fait cette blague pour les rapprocher d’une certaine façon et les pousser à collaborer ? C’est bien le genre d’initiative pacifique qui serait dans l’idéologie du vieux Choixpeau et du corps professoral. D’ailleurs, je vois plus Albus Dumbledore à la tête de la blague plutôt qu’un autre professeur. »