Tous avaient beau dire qu'ils ne croyaient pas un mot aux racontars de Potter et Dumbledore, il n'en était rien. C'était rare en effet que le Chemin de Traverse soit à ce point déserté maintenant que l'été avait commencé. Par la passé, à cette date, la terrasse du glacier était noire de monde et les boutiques bondées. Mais aujourd'hui, Daphné marchait presque seule sur le chemin pavé. Au final, les autres avaient peur, ils n'osaient plus sortir mais pas non plus avouer qu'ils croyaient Potter. La jeune fille haussa les épaules, désespérée. Elle haïssais l'hypocrisie des gens dans cette situation, ne comprenait pas vraiment ce que nier l'évidence pouvait leur apporter. Mais ce n'était pas son problème pour le moment, elle avait autre chose à penser. L'anniversaire de sa mère aurait lieu la semaine prochaine et il fallait absolument qu'elle lui trouve un cadeau. Malheureusement, il ne lui restait pas beaucoup d'argent de poche, elle avait un peu trop dépensé à Prés-au-lard pendant l'année. La question du cadeau devenait donc problématique et sur ce coup, Daphné n'avait pas été très maline. Elle soupira en lançant un regard circulaire aux magasins autour d'elle, à la recherche d'une idée. Vêtements : trop cher, Quidditch : pas le style de sa mère, Apothicaire : Pas de cadeaux là-dedans, Librairie :... Pourquoi pas ?
Daphné entra donc chez Fleury & Bott, bien décidée à trouver le livre qui ferait plaisir à sa mère. La boutique était vide, ce qui impressionna un peu la Serpentard. Elle s'approcha des rayonnages, marcha entre les étagères et les étalages,... Ce qui ne l'aida pas le moins du monde.
Elle était arrêtée au milieu d'un rayon lorsqu'une fille de son âge, portant l'uniforme de la boutique sortit d'une pièce au fond de la boutique et s'approcha d'elle, souriant poliment.

« Bonjour, je peux vous aider ? »

Daphné regarda la jeune fille de haut en bas. Ce n'était pas une manière de se comporter mais c'était plus fort que la Serpentard qui avait pris cette manie à force de côtoyer Pansy. Mais elle ne reconnut pas son interlocutrice. Cela voulait dire au moins qu'elle ne la haïssait pas officiellement, elle pouvait donc lui répondre sans problème.

« Je cherche un livre. Un roman ou quelque chose dans ce genre, pour ma mère. C'est son anniversaire. »

Daphné suivit la vendeuse entre les rayons, faisant quelques pauses lorsque celle-ci s'arrêtait pour prendre des livres.

« Donc plutôt un roman, vous dites ? »

La Serpentard -comme c'était étonnant, dirait un Gryffondor quelconque- n'était pas vraiment d'humeur ce jour-là. Depuis quelques semaines, depuis la fin du tournoi, en fait, elle était sans arrêt stressée et agacée par tout, elle dormait très mal et son humeur s'en ressentait. Elle fut donc légèrement agacée par la question de la jeune femme, qui semblait bien décidée à prendre tout son temps et a poser des questions stupides auxquelles Daphné avait par ailleurs déjà répondu. Elle prit une profonde inspiration pour se calmer, après tout cette fille essayait simplement de l'aider (sa théorie selon laquelle le monde entier cherchait à lui pourrir la vie ces temps-ci n'avait aucune justification, il fallait bien le reconnaître).

« Oui, un roman, ça me parait être le mieux pour un cadeau d'anniversaire... »

Le ton de sa voix était légèrement acide et l'ennui pointait sans conteste mais elle avait gardé un sourire plaqué sur les lèvres, en parfaite hypocrite bien élevée qu'elle savait être. L'art et la manière d'être désagréable en souriant, c'était une spécialité de la maison verte et argent.

« Plutôt quel genre ? »

C'était en soi une question parfaitement légitime, qui avait tout à fait sa place dans la situation actuelle. Il y a un an, Daphné y aurait d'ailleurs répondu gentiment. Mais ces temps-ci, elle aurait plutôt eu tendance à tourner les talons et sortir de cette boutique « remplie d'incapables ». Mais elle avait vraiment besoin d'un cadeau pour sa mère et n'avait ni les moyens ni l'envie de chercher autre chose qu'un livre. Elle se décida donc à répondre, son sourire disparaissant complètement.

« Je ne sais pas moi ! Un livre qui marche bien en ce moment, quelque chose qu'on aurait envie de lire... C'est votre travail de me conseiller, non ! »

Son léger agacement commençait a se transformer en réelle irritation. Elle ne voulait rien d'autre qu'un roman potable pour sa mère pas répondre à une enquête commerciale. Elle soupira et croisa les bras sur sa poitrine, regardant autour d'elle à la recherche de quelque chose pour se calmer, ce qui ne semblait pas gagner.

Le sourire de la cliente disparu, et elle paraissait fortement agacée. Merveilleux, vraiment... Ambre regrettait déjà de s'être levée ce matin pour venir travailler et se dit qu'elle aurait dû se faire porter pâle. Mais déjà, la propriétaire n'aurait pas vraiment apprécié à son humble avis, et ensuite elle avait besoin de l'argent qu'elle gagnait. Bien, il ne lui restait donc plus qu'à se montrer calme et patiente. Autant dire que de la patience, Ambre n'en avait pas beaucoup à revendre. Elle retint un soupire, se contentant de prendre une profonde inspiration pour affronter cette épreuve qui se présentait face à elle. Bien, rester souriante et serviable. Bref, être hypocrite. Joie.

Parfois, Ambre regrettait profondément le fait de d'avoir été bien éduquée. Toujours être polie, souriante. Bien, son sourire était toujours là, parfait, il ne lui restait donc plus qu'à faire son travail et se montrer agréable. Même si elle avait bien envie de remettre cette fille à sa place pour le moment. Tenant cinq livres entre ses mains, elle en prit un dernier avant de se tourner vers Daphné, toujours souriante et pleine d'une patience inexistante.

-Bien, alors...

Elle prit le premier livre de la pile et montra la couverture à Daphné. Celle-ci était simple, en cuir teinté de bleu. Le titre, « Rencontre à Godric's Hollow » était écrit en lettre d'or avec le nom de l'auteur en dessous. C'était un roman qui datait un peu, mais qui avait connu un certain succès à son époque.

-Ici c'est une histoire d'amour, assez classique. Le style d'écriture est assez pertinent, et même si c'est un peu niais, tout le monde peut aimer.

Elle le posa sur le présentoir à côté d'elle où d'autres livres se trouvaient. Elle présenta le second livre, un roman policier qui présentaient de bonnes critiques. Un autre sur les vampires qui se montrait plutôt controversé, un roman plus historique et une biographie romancé. Enfin, elle présenta le dernier livre. C'était un livre de poche, toujours avec une couverture de cuir, même si plus souple que les autres cette fois-ci. La couverture était d'un vert sombre, le titre se présentant en lettres argentés sur la couverture et la tranche du livre. Quelque chose disait à la jeune femme que celle se tenant devant elle apprécierait les couleurs du livres. C'était déjà ça de gagné.

-  « Le Trône d'Argent ». C'est une histoire se situant dans un monde médiéval réaliste tournant autour des intrigues pour la conquête du trône d'un royaume.

Voilà, les livres étaient présentés, et si ça ne lui plaisait pas, elle lui refourguerait le dernier gros succès en date, même si aux yeux de la jeune femme, ce serait la pire chose à faire pour un anniversaire. Son interlocutrice ne semblait pas particulièrement sympathique de toute façon.

C'était quasiment imperceptible, mais Daphné ressentit que la vendeuse n'appréciait pas son comportement et qu'elle se retenait d'être désagréable. C'était compréhensible mais la Serpentard n'avait franchement aucune envie de s'excuser ou de se calmer. Elle voulait juste acheter un livre et rentrer chez elle, passer à autre chose et retourner dans l'espace réconfortant du Domaine, là où elle serait en sécurité. La fille face à elle gardait son sourire poli, ce qui eut le don d'agacer encore un peu plus Daphné. Elle pianota des doigts sur son bras, montrant son impatience quand l'autre se décida à reprendre la parole.

« Bien, alors... »

Et elle commença a lui montrer tous les livres qu'elle avait pris et les montrait à Daphné en résumant rapidement l'histoire ou le contenu. Roman d'amour...pas vraiment digne d'intérêt mais ça pouvait très bien plaire à sa mère, roman policier...plus intéressant, Autobiographie...pas la peine de l'envisager, roman historique non plus. La jeune fille posait les livres sur le présentoir à côté d'elle au fur et à mesure qu'elle les présentait, les étalant sous les yeux de sa cliente. Elle n'en tenait à présent plus qu'un en main, petit, à la couverture en cuir verdoyante et aux inscriptions argentées. Ce livre, aux couleurs de Serpentard, attira l'œil de Daphné mais elle fut très vite déçue en écoutant le résumé. Et elle ne pouvait évidemment pas offrir à sa mère un livre sans intérêt sous prétexte qu'elle avait aimé la couverture. Décidément, cette petite excursion sur le Chemin de Traverse se passait très mal. Daphné regarda encore une fois les différentes couvertures étalées devant elle en réfléchissant à ce qui serait le plus susceptible de plaire à sa mère. La première réponse qui lui vint fut : rien. Elle jeta un rapide coup d'œil à la vendeuse qui souriait toujours et cela énerva Daphné. Elle avait bien l'intention de lui faire perdre ce petit sourire de la fille zen à qui tout passe au-dessus.

« Vous n'avez rien de mieux ? Ou vous avez simplement décidé de faire preuve de mauvaise volonté ? Ma mère est une femme intelligente et cultivée, elle ne lira certainement pas ces idioties. Vous n'avez rien pour les clients sérieux, ici ? »

Elle lança un regard rapide au reste de la pièce, vide et réprima un sourire avant de reprendre :

« Je devrais peut-être demander à votre supérieur ? »

La vendeuse perdit son sourire une demi-seconde à peine et lorsqu'il reparut c'était très visiblement forcé. Elle était énervée ou du moins agacée. C'était une sorte de victoire pour Daphné mais elle n'en tira aucune satisfaction. Elle n'avait pas vraiment prévue de se prendre la tête aujourd'hui, elle était sortie dans le simple but d'acheter un cadeau d'anniversaire puis rentrer le plus vite possible et elle se retrouvait maintenant a embêter une vendeuse. Et c'était beaucoup moins drôle sans Pansy, pour être tout à fait honnête. La brune s'en sortait bien mieux pour embêter son monde et faire perdre patience aux autres. Et dire qu'habituellement, il lui en fallait beaucoup à Daphné pour perdre son sang-froid...
La jeune fille reprit la parole, toujours d'un ton très calme mais laissant percer son agacement dans ses mots. Daphné préféra ne pas relever, elle en avait déjà assez fait et de toute évidence, son interlocutrice n'avait pas l'intention de perdre son sang-froid. Après tout, si elle s'en prenait à une cliente, elle avait de grandes chances de perdre son travail. Daphné écouta donc sagement l'autre lui dire qu'un roman n'était pas un cadeau idéal pour une femme cultivée comme sa mère qui devait déjà posséder tous ceux qui en valait le coup. Apparemment, les romans n'étaient pas le fort des Sorciers... La Serpentard commençait même a regretter d'avoir penser à un livre et d'avoir dépensé tout son argent de poche au court de l'année. Elle se disait qu'un livre serait une bonne idée, étant donné que sa mère aimait beaucoup lire, mais elle s'était trompée.
D'ailleurs, la jeune fille confirma les pensées de Daphné en proposant de se tourner plutôt vers des essais. Elle retint une réplique prouvant sa mauvaise fois du genre « il n'y a donc aucun bons romans dans cette boutique ! » et suivis en silence la vendeuse qui lui proposait un essai sur le sang chez les sorciers.
Daphné fut légèrement surprise que ce genre d'ouvrage continuaient d'être écrits et publiés surtout dans une société où l'on prétendait n'avoir aucune idée reçue et accepter les Sang-de-bourbes sans problème. Mais il fallait reconnaître que c'était un sujet intéressant, rien que pour savoir si les préjugés étaient valables ou non. La jeune fille ne parvenait cependant pas à imaginer que ce genre d'ouvrage avait un véritable succès. Mais il était tout à fait possible que sa mère apprécie ce genre de livre. Ses parents n'étaient pas le genre de sorciers a vouloir faire la guerre aux Sang Impurs mais ils n'en seraient pas moins intéressés par ce sujet. Et Daphné voulait partir au plus vite, elle ne jouait donc plus la difficile.

« Oui, ce sera très bien, je vous remercie. »

Daphné attrapa elle-même un exemplaire de cet essai qu'elle feuilleta un instant. C'était un livre à la très belle couverture de cuir brun et suffisamment épais. Et si Enora n'aimait pas, au moins Daphné, elle, le lirait. C'était toujours mieux qu'un roman d'amour ou un roman médiéval et sa mère risquait quand même d'apprécier, rien que pour le fait d'en apprendre plus à ce sujet. Daphné, le livre en main, suivit donc la vendeuse jusqu'à la caisse. Celle-ci semblait vraiment heureuse de pouvoir se débarrasser de sa cliente. Daphné paya son livre, ne demandant même pas à ce qu'on lui fasse un paquet cadeau, elle s'en occuperait elle-même, et elle sortit de la boutique. Elle se retrouva à nouveau dans la rue presque vide mais ne parvint pas à lâcher un soupire de soulagement : ce vide, cette inquiétude perceptible chez tout le monde, n'aidaient pas à se détendre. Elle parcourut la rue à toute vitesse, serrant l'ouvrage contre sa poitrine et s'engouffra dans le Chaudron Baveur pour rejoindre la cheminée qui la renverrait enfin chez elle. Cette courte visite sur le Chemin de Traverse avait été vraiment horrible et Daphné était soulagée que se soit enfin finit. Elle espérait seulement que la prochaine fois qu'elle sortirait, elle serait moins stressée.
Elle prit une poignée de poudre de cheminette et entra dans l'âtre.

« Domaine Greengrass ! »

Ses traits se détendirent enfin lorsqu'elle ressentit la réconfortante sensation des voyages en cheminée. Elle était chez elle une seconde plus tard.